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Bruno Mantovani, un art en crescendo

tdg.ch

Rocco Zacheo

Dans le paysage de la création musicale française, Bruno Mantovani est depuis plusieurs années un incontournable. Compositeur et chef d’orchestre foisonnant, mais aussi directeur du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, le natif des Hauts-de-Seine fait une incursion ce soir à Genève, où il dirige le Lemanic Modern Ensemble – formation transfrontalière fondée en 2007 – et présente en création mondiale son Concerto de chambre N° 3.

Comment est née cette collaboration avec le Lemanic Modern Ensemble?

Les premiers contacts remontent à 2014, à un concert centré autour de quelques-unes de mes œuvres que nous avons donné à Shanghai. Ce fut une expérience forte, nous avons alors convenu que nous allions nous retrouver ailleurs.

Trois ans plus tard, vous voilà avec le troisième volet de vos Concertos de chambre. Quelles sont les continuités et les ruptures présentes dans ces pièces?

Il y a un point qui les relie : dans chacune, des instruments se glissent l’un après l’autre dans le rôle de solistes. Ces Concertos pourraient donc être considérés comme mes Brandebourgeois à moi. Scrutées sous un autre angle, ces œuvres recèlent beaucoup de ruptures. À commencer par celle du choix de l’instrumentation, qui change à chaque fois puisqu’elle découle des suggestions de l’ensemble commanditaire de l’œuvre.

Est-ce que ce domaine de la composition vous pose des difficultés?

Par rapport à la production pour grands ensembles ou pour quatuors, je campe dans un territoire moins fréquenté, où je ne me sens pas véritablement à l’aise. Il y a plein de questions qui se posent sur le travail de composition et d’orchestration, sur la place du soliste et de sa virtuosité. Et puis, comme souvent, on est confronté à des propositions d’instruments plutôt standardisées et, cependant, on doit parvenir à garder un discours musical original. Cela dit, ces difficultés me stimulent.

Enfant déjà, vous vous êtes intéressé au répertoire contemporain. D’où vient cette précocité?

J’ai commencé mes études par le piano et d’entrée, je me souviens avoir été attiré par des figures comme Bartók, ou par une musique sortant des sentiers habituels. Plus tard, à l’âge de 8 ans, je me suis mis aux percussions et c’est alors que j’ai découvert d’autres compositeurs comme Varèse ou Boulez, qui offraient au jeune musicien que j’étais une liberté. Il s’est produit à ce moment un passage naturel qui m’a poussé à préférer par exemple le langage de Xenakis à celui de Beethoven.

Et la nécessité de composer, comment est-elle apparue?

Le fait déclencheur s’est produit à 15 ans, en suivant les cours de Christophe Maudot. J’ai compris alors que j’allais définitivement me tourner vers les musiques du présent.

Qui ont été, à partir de ce choix, vos modèles, vos maîtres à penser?

Il y a eu évidemment Pierre Boulez, avec qui j’ai eu la chance de travailler. Mais je pourrais citer encore deux personnages inspirants : Wolfgang Rihm et Peter Eötvös. Un artiste, ce dernier, qui n’a pas peur du beau, alors que longtemps, la beauté n’était pas une priorité dans le domaine de la création contemporaine.

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