30|03|19
Figuren

Des références extra-musicales innervent les trois œuvres en présence de ce programme. Les Vier Figuren de Bettina Skrzypczak sont inspirées par un groupe de quatre sculptures d’Alberto Giacometti. Chacune d’elles constitue en soi un centre de force spirituelle, tandis qu’en tant que groupe, elles créent dans l’espace un champ de tensions de charge phénoménale. En utilisant les sons d’un ensemble divisé en trois groupes, la compositrice « tente de capturer quelque chose de cette puissante présence spirituelle ». Le titre de l’œuvre de Kaija Saariaho Graal Théâtre est une allusion à une nouvelle de Jacques Roubaud. La relation traditionnelle qui s’établit au sein de la forme concerto, entre le soliste et l’ensemble, est ici vue comme une «histoire vivante» dans laquelle l’individualité doit parvenir au Graal musical, c’est à dire au point où la relation avec le collectif s’apaise et se trouve stabilisée. Littérature encore pour Misato Mochizuki, avec Roland Barthes et sa Chambre claire, qui traite de photographie. Les photos qui parlent à l’imaginaire sont, pour lui, porteuses d’une dualité entre le studium ( qu’il définit comme une étendue, un espace donné ) et le punctum, vu comme une sorte de coup de dés qui introduit le hasard, l’inattendu. L’œuvre musicale épouse cette dialectique et procède à diverses correspondances entre le son et l’image : la reproduction, à l’infini, d’un instant fugitif et l’idée d’un panorama animé sous l’action de la lumière se traduisent par un rythme binaire fixe pour la totalité de la pièce, alors que l’équivalence recherchée pour les perspectives visuelles et les reliefs est obtenue au moyen d’un travail sur les timbres, les brusques écarts de dynamiques et la superposition complexe des tempi.

Co-production Festival Archipel