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Pour ses 10 ans, le Lemanic Modern Ensemble voit grand

Sylvie Bonier

Le groupe transfrontalier ouvre sa nouvelle saison dans l’opulence. Retour sur une belle et généreuse aventure

Comme toutes les grandes histoires, celle du Lemanic Modern Ensemble a commencé tout doucement, sans faire de bruit. Dix ans après les premiers balbutiements, le groupe transfrontalier peut s’inscrire avec fierté dans le paysage musical du Grand Genève.

Après neuf années de concerts à saute-frontières dans divers lieux entre la France et la Suisse, il affiche une saison de neuf rendez-vous fixés à la Comédie de Genève pour la partie suisse, et à l’Auditorium du Conservatoire d’Annemasse pour la partie française. Mais aussi à l’Alhambra, au Temple de Carouge, au BVC Concert Hall de Lausanne ou au Théâtre Kléber-Méleau de Renens et même au Grand Théâtre d’Aix en Provence.

Un programme ambitieux

Pour le dixième anniversaire, pas moins de dix créations mondiales rythmeront les concerts sur deux saisons avec des œuvres de Montovani, Murail, Dayer, Ciceri, Kyburz, Hudry, Naon, Gervasoni, Bolens et Blank. La fête ne manque pas d’ambition.

Les mêmes affiches toucheront des publics complémentaires puisque d’un côté les programmes résonneront dans des salles « traditionnelles » de Romandie, et de l’autre, dans l’auditorium d’un quartier de France déclaré « difficile » par Manuel Valls. La belle offre partagée et défendue par vingt musiciens débute ce lundi au Boulevard des Philosophes.

Tout commence avec deux musiciens

A l’origine d’une des aventures les plus originales de cette décennie, deux musiciens de la Haute École de Musique de Genève. Au sortir de leurs études, le percussionniste Jean-Marie Paraire et le tromboniste Jean-Marc Daviet se lancent dans un projet de groupe. Ils veulent se produire en concert sans attendre d’avoir à cachetonner ou de pouvoir rejoindre un hypothétique orchestre.

Les deux compères entraînent d’autres musiciens dans leur sillage autour de programmes où la modernité reine se conjugue avec les classiques. « Namascae » naît. L’appellation ne vient pas des Indes lointaines, mais tout simplement d’Annemasse, dont c’est le nom romain.

La majorité des membres du groupe vit en effet en France voisine, où ils ont fait leurs premières études avant de rejoindre les institutions genevoises. L’ensemble s’installe alors dans l’Auditorium du conservatoire de la ville frontalière, généreusement mis à leur disposition pour leurs répétitions et leurs concerts.

« Du temps pour progresser, trouver une cohésion et exister »

Le groupe a besoin de quelqu’un pour l’aider à se structurer et se développer du côté suisse aussi. Car les musiciens ont bâti leur vie professionnelle de l’autre côté de la frontière, dans différentes écoles ou conservatoires. Jean-Marie Paraire se tourne alors vers son ancien professeur de percussions, William Blank. Compositeur, enseignant et chef de l’Ensemble Contemporain de Lausanne, longtemps au pupitre des percussions de l’OSR, le musicien, très actif, pose avec les initiateurs les bases de ce qui deviendra progressivement le Lemanic Modern Ensemble, pour plus de lisibilité. « Je leur ai tout de suite dit qu’il fallait du temps pour progresser, trouver une cohésion et exister. Que si l’ensemble résistait à dix années, il pourrait commencer à vivre », explique William Blank.

Un public conquis

Sa prophétie s’est avérée juste. Cassandre, le célèbre monodrame de Michael Jarrell, enflamme la Comédie de Genève en septembre passé sous la baguette de Jean Deroyer avec Fanny Ardant mise en scène par Hervé Loichemol. Le Lemanic Modern Ensemble y révèle une virtuosité et une musicalité remarquées. Depuis, on se l’arrache, de Saint-Pétersbourg à Aix-en-Provence, en passant par Paris, Avignon ou Shanghai.

Et partout, le public redemande de ces coproductions délibérément transfrontalières. La modernité des affiches, les présentations de programmes avant les concerts et les rencontres agrémentées de boissons en conclusion séduisent et élargissent l’audience. Avec le message le plus actuel et fort qui soit: la musique, rassembleuse par essence, se joue des limites nationales.

Comédie de Genève, lundi 7 novembre à 19h30. « Notturni » (Mozart, Ligeti, Webern et Benjamin), précédé d’une présentation par Philippe Albèra. Le 9 novembre à 19h30 à l’Auditorium d’Annemasse, concert commenté.

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